
MARY PRINCE – Récit autobiographique d’une esclave antillaise.
RÉSUMÉ
Adaptée du récit autobiographique La Véritable Histoire de Mary Prince, esclave antillaise, la pièce présente le premier témoignage d’une esclave sur sa condition, écrit avant l’abolition de l’esclavage en 1831 dans les colonies britanniques. Mary Prince raconte avec pudeur et retenue son incroyable odyssée. Née aux Bermudes, vendue à l’âge de douze ans, elle est ballottée de maître en maître, d’île en île, jusqu’à Antigua. Puis elle suit son dernier propriétaire en Angleterre où elle demande son affranchissement.
Restituant son parcours et son combat, Mary Prince va dépeindre avec humanité la réalité, ou plutôt les différentes réalités de la vie des esclaves : le quotidien d’une esclave de maison, d’une esclave dans une saline ou encore des esclaves dans les champs. Au-delà d’un simple texte autobiographique, ce témoignage présente un intérêt exceptionnel tant du point de vue politique qu’historique : politique, car le XIXe siècle voit aboutir la lutte pour la suppression de l’esclavage ; historique, parce qu’il nous oblige à entendre une voix que l’on condamnait au silence.
NOTE D’INTENTION
Après ma première lecture du récit de Mary Prince, j’étais tellement bouleversée que je me suis dit qu’il fallait absolument retranscrire ce texte et le faire vivre. C’est en découvrant ce témoignage que j’ai réalisé que nous n’avions aucun témoignage d’esclaves dans le monde francophone, hormis quelques notes de procès, qui n’apportent pas la qualité d’informations fournies par les slave-narratives anglais ou américains.
Nous ne disposons que de peu de noms, peu de photos, peu d’éléments pour rappeler cette période. La parole de Mary Prince est fondamentale à plus d’un titre. Tout d’abord parce qu’elle est une femme et qu’à ma connaissance, il n’existe que 6 récits de femmes mises en esclavage (Six Women’s Slave narratives de Henry Louis Gates Jr), contre plus d‘une centaine chez les hommes. Comme il n’y a pas de témoignage, on pourrait penser qu’il n’y pas d’histoire, et c’est aussi une des raisons pour laquelle la France a autant de mal à inclure cette tragédie à sa propre histoire.
Mary Prince prête donc sa voix à toutes les « Mary Prince » martiniquaises, guadeloupéennes, guyanaises, réunionnaises, et haïtiennes dont nous n’avons pas de paroles jusqu’ici. Un écho qui résonne encore. L’histoire de Mary Prince est d’une modernité effrayante. Il nous ramène à la réalité de tant de personnes qui vivent l’esclavage moderne. C’est cette forme, un témoignage brut et immédiat, que je te tiens à respecter.
Souria Adèle
MISE EN SCÈNE
Un plateau nu, entièrement vide. Une femme (vêtue d’une longue robe, de style 19e siècle) rentre et livre son témoignage. C’est le récit d’une femme, de Mary Prince sur sa vie d’esclave. Il s’agit très vite de comprendre que ce n’est pas la peine d’imaginer un jeu de décor. Danse immobile. Solo effroyable. Notre attention est centrée uniquement sur Mary Prince, la force de sa présence durant la terrifiante histoire qu’elle porte à notre connaissance. L’importance de la lumière qui participe à la transformation du personnage. Dans le spectacle Mary Prince, au-delà de la vérité historique et politique, c’est la nécessité absolue pour Mary Prince de porter témoignage et cette voix qui est si loin et si proche témoigne aussi du présent et rappelle toujours la même nécessité de rester toujours vigilant.
Alex DESCAS (metteur en scène)
SOURIA ADÈLE
Martiniquaise ayant toujours vécu dans l’Hexagone, après deux ans d’études de droit elle décide de se consacrer à la danse et au chant (Julien Clerc, Grand Orchestre du Splendid, Nino Ferrer, etc.) Elle a joué entre autres sous la direction de Jérôme Savary dans La Résistible Ascension d’Arturo Ui, de Jean-Paul Lucet dans Barnum ou de Jean-Luc Moreau dans Impair et Pair. Suite à sa rencontre en 1996 avec John Strasberg, elle s’oriente vers la comédie. Mais face à l’indigence des rôles qui lui sont proposés à la télé, elle écrit son premier seule en scène Marie-Thérèse Barnabé, Négresse de France, témoignage d’une femme noire dans la France d’aujourd’hui, qui sera présenté à la Comédie Bastille, au Café de la Gare, au festival d’Avignon et en tournée. Mary Prince est son deuxième seule en scène. En 2017 et 2018, elle est juré du concours national «La Flamme de l’Egalité». Le 27 avril 2018, elle intervient au Panthéon lors du 170e anniversaire du décret d’abolition de l’esclavage du 27 avril 1848 en présence du président de la République.
LA COMPAGNIE MAN LALA
La compagnie Man Lala a été créée en 2001 pour aider à la promotion des comédiens afro-caribéens dans l’Hexagone. Elle défend aussi les langues et cultures créoles à travers des ateliers hebdomadaires.
LA PRESSE EN PARLE
Authentique document inestimable. Son récit est empreint de dignité et d’une résistance intérieure étonnante. Souria Adèle, seule en scène, livre ce texte avec une dignité qui en fait ressortir l’émotion. Un spectacle d’une grande valeur historique, audacieux et émouvant.
Seule en scène, Souria Adèle s’imprègne de ce texte à l’état brut dans une mise en scène épurée qui met en valeur la puissance de ce témoignage.
…Très vite, nous voilà captivés, cette voix nous fascine, et aussi chacun de ses rares mouvements, la tête qui se penche, un geste de la main, et même ses silences.
La parole de cette femme, remplie de pudeur, est magnifique. Elle énonce les faits relatifs à sa vie, ses souffrances, sans jamais tomber dans le pathos… La comédienne s’est glissée avec une grande sensibilité dans la peau de son personnage. C’est bouleversant.
Souria Adèle ne joue pas, elle est Mary Prince l’espace d’une heure. Laissant dans les mémoires des phrases insoutenables comme celle-là : Maître par pitié, ne me tuez pas complètement !
Avec Mary Prince, Descas et Adèle offrent au public parisien d’entendre une voix que l’on croyait condamnée au silence. Cette pièce contribue à lui donner du corps, si meurtri soit-il.
Le jeu de la comédienne est au plus proche d’un réalisme qui campe le personnage de Mary Prince (…) Elle garde une dignité dans ses propos et son attitude. Elle raconte juste (…) Tout semble posé, réfléchi. Souria Adèle incarne des mots qu’elle dit sans rancœur et sans rancune.